J’ai écrit ici que j’utiliserai mon blog pour faire une psychanalyse personnelle, que ça me servirait sûrement d’exutoire et de pouvoir faire le deuil de certaines choses. Quelqu’un m’a répondu que même si un blog c’était cool, voir un vrai professionnel ça peut être pas mal aussi quand on a des soucis. Alors, autant je ne nie pas avoir des soucis dans ma tête, autant je pense que je vais me passer de psy. Pourquoi me demanderez-vous ? Oh, un bête histoire issue du passé. C’est l’histoire d’un homme et d’un psy, d’une armoire vitrée et d’une photo. Ça vous parait obscure ? Ne vous en faites pas, vous allez tout de suite comprendre. Allongez-vous confortablement dans le divan et je vais vous raconter mon histoire.
Nous sommes en 2009, j’habite encore dans la banlieue nord de Paris avec Catherine, ma copine de l’époque (Note : le nom a été volontairement changé) et les choses ne se passe pas tout à fait comme prévu. En effet, en poste dans une grosse entreprise fabricante de voiture, je venais d’apprendre que, en pleine crise automobile, j’allais être remercié après 2 ans de prestation pour eux. Un coup assez dur au moral que j’avais du mal à encaisser. C’était le premier vrai échec de ma carrière si vous voulez.
Petite précision : ce n’était pas de ma faute, je n’étais pas responsable de cette fin de contrat, j’étais l’avant dernier prestataire du plateau parmi les 17 que nous étions un an et demi plus tôt et j’avais assuré pendant tout ce temps au point où mon chef m’avait donné carte blanche pour que je fasse mon travail en toute quiétude. Sauf que le hic était qu’il restait des gens de la boite à recaser, crise oblige, et que la direction avait été claire : on vire les prestataires pour faire de la place aux internes.
Déjà le moral passablement dans les chaussettes, j’avais également un autre problème majeur à ce moment précis. Mon couple. En effet, avec ma future ex, ce n’était pas vraiment la joie : Elle était très fusionnelle et j’étais très indépendant. J’avais coupé pas mal de liens avec mes potes pour être avec elle car elle était très jalouse et je commençais à mal le vivre. Si vous rajoutez à cela qu’elle était bipolaire à tendance dépressive, disons que j’avais l’impression d’être un peu piégé dans cette situation. J’en reparlerai sûrement dans un autre billet à l’avenir.
Catherine à l’époque voulait m’aider mais ne savait pas comment, ses mots et ses attentions ne me touchaient plus et elle voyait bien que je sombrais lentement comme le Titanic et que la fanfare n’était pas encore arrivée sur le pont. Alors on a parlé ensemble de moi, d’elle et de ce qui lui faisait du bien à elle dans ce genre de situation. Je vous arrête tout de suite, on n’a pas parlé de cul, bande de gros pervers. Non ce qui lui faisait du bien c’était sa psy. Depuis le temps qu’elle la suivait, c’était presque devenu quelqu’un de la famille pour elle, et il lui arrivait de l’appeler quand ça n’allait vraiment pas bien et après une bonne discussion, elle reprenait toujours le dessus.
Sauf que moi les psys, ce n’était pas ma came. Un mec qui te prend ton pognon pour t’écouter déblatérer et juste noter des trucs sur son calepin, je trouvais que c’était une arnaque. Je n’avais pas confiance et je me disais que je n’avais pas de problème dans ma tête donc je ne voyais pas l’intérêt que quelqu’un y trifouille. Sauf que Catherine a vraiment insisté et ça s’est terminé en « si tu m’aimes, fait le pour moi s’il te plaît ».
Alors je me suis laissé convaincre. Il y a plein de gens bien qui vont voir un psy et ça leur fait du bien. Au point où j’en étais et prêt à tout pour essayer de m’en sortir, j’accepte de tenter le coup au moins une séance pour faire plaisir à Catherine et voir comment ça se passe.
Sauf que le hic c’est que sa psy ne prend pas de nouveau client. Alors j’ai directement pris le bottin et j’ai regardé à « psy » ce qu’il y avait.
Attendez. Le bottin. Ha merde c’est vrai. Alors le bottin, c’est les pages jaunes à l’époque mais en format papier et pas en format numérique et la poste en distribuait un gratuitement à tout le monde tous les ans. Ouais c’est fou, je sais, mais à l’époque c’était normal. Bon bref, continuons.
Donc j’épluche les noms et les adresses et je tombe sur un psy qui est situé à quelques centaines de mètre de mon boulot. Je l’appelle et je lui explique la situation. Après quelques questions le miracle se produit : il y a de la place et il accepte de me prendre à 14h la semaine d’après. Il me précise quand même qu’il est un peu dubitatif car il est psy pour enfant mais il est psy quand même et veut bien tenter le coup pour me dépanner, quitte à me rediriger vers un autre praticien par la suite.
Arrive la date fatidique et je me présente au cabinet. C’était le cliché typique du cabinet de psy pour enfant, une salle d’attente avec des jouets pour enfant de 4 ans, des legos et des playmobils et enfin quelques revues datant de plusieurs années sur la table basse. Je commence à en feuilleter un lorsqu’il ouvre sa porte et m’invite à entrer.
Le type est lui aussi le cliché du psy, pas très grand, la quarantaine, barbe entretenue, petites lunettes rondes, une légère calvitie naissante et une chemise à carreau avec un gilet en laine verte par-dessus.
Il me propose de m’installer sur la chaise devant son bureau. Je suis déçu je voulais pousser le cliché jusqu’au bout et m’allonger sur son fauteuil de consultation. Il s’assoit à son bureau et commence à pianoter sur son PC pour prendre des notes.
L’entretien débute et je lui parle de mon travail, de Catherine, de mes amis que je ne vois pas souvent, de ma frustration et de ma tristesse en ce moment. Il me pose plein de question et fait quelques suppositions complètement à côté de la plaque. Je le reprends plusieurs fois pour lui explique que non ce n’est pas comme ça que je vois les choses.
Plus on avance dans l’entretien et plus je sens que l’atmosphère est étrange. Je commence un peu à décrocher de ses questions. Je regarde un peu partout autour de moi et j’admire sa collection de livres dans ses armoires vitrées. Je me demande s’il les a tous lus. Je ne pense pas mais je n’ose pas lui demander.
Je sens également qu’il commence à flancher, ses questions se font moins précises, il prend son temps pour répondre. Je commence à me sentir mal à l’aise et je pense qu’il fait semblant de m’écouter quand je lui parle. Alors on est là, tous les deux à se demander quand tout cela va finir.
Lorsque tout à coup, je m’aperçois d’une chose rigolote : de la manière dont je suis placé sur mon fauteuil, je peux voir son écran de PC dans le reflet de la vitre de l’armoire située derrière lui. Mais comme je suis mal placé, je ne vois pas très bien. Alors, histoire de me sortir de ma torpeur, je décide de changer de position sur la chaise et me pencher légèrement sur la droite. Voilà comme ça, parfait, stop on bouge plus.
C’est légèrement flou à cause de la focale de la vitre mais je peux clairement distinguer qu’il est sur un navigateur web et qu’il est en train de surfer pendant qu’il me parle. Ha bah bien gros, dit le que je te fais chier au point où tu sois obligé d’aller sur le net te changer les idées.
Je suis mi-énervé mi-amusé par la situation. Ben oui, il pourrait quand même faire l’effort de m’écouter attentivement ! Mais d’un autre côté, savoir que je peux voir ce qu’il fait sans qu’il le sache (car aucun doute, il ne m’a pas capté) c’est grisant. Alors je continue à jouer le jeu et je ne perds pas une miette de ce qu’il fait.
Oh attends, il va sur un site de rencontre on dirait. Tiens, il parcourt des fiches je crois, attends, qu’est-ce qu’il regarde ? Oh ben ça alors, il regarde des photos d’homme torse nu.
Et puis je capte : ce n’est pas un site de rencontre c’est un site porno ! Ho mais le coquin, faire ça alors qu’il est en consultation. Bah il fait ce qu’il veut, en tout cas ça me fait sourire. Ce gros pervers qui matte du cul au boulot, je vous jure.
Attend un peu… Il n’est pas genre, un peu jeune cet homme sur la photo ?
Mon sourire s’est évanouit en un instant. Il n’était pas sur un site porno. Il était sur un site pédophile et les photos qu’il faisait défiler depuis quelques minutes était des photos d’adolescents de 12-14 ans dénudés.
J’ai dû réprimer une grosse envie de vomir et j’ai littéralement buggué sur le coup. Et puis je me suis souvenu de sa plaque à l’entrée Psy pour ENFANTS et je me suis rappelé les jouets dans la salle d’attente. J’ai tellement été choqué qu’il m’a demandé si ça allait. J’ai baragouiné un truc incompréhensible sur le fait que c’était un peu dur de parler de ce sujet-là (il m’avait posé une question sur mes amis que je ne voyais plus) et qu’il me fallait un peu de temps avant de pouvoir vraiment aborder le sujet.
Il a changé de sujet mais pas sa pratique et j’étais de plus en plus distant avec lui. J’avais qu’une envie c’était de partir loin et vite. Alors j’ai regardé ailleurs comme pour me convaincre que ce n’était pas vrai. Sauf qu’à chaque fois que je le regardais lui pour lui répondre, je ne pouvais pas ignorer le reflet derrière lui.
Après quelques minutes il a enfin mis fin à l’entretien. « et bien on a du pain sur la planche, nous aurons beaucoup de sujets à aborder ensemble lors de notre prochain rendez-vous ». J’ai souri et répondu « mais oui, bien entendu » mais intérieurement j’étais en train de hurler. Il me raccompagne à la porte. Formalités et politesses d’usage et je sors enfin de son cabinet.
Choqué, je n’ai pas su quoi faire. J’ai mis plusieurs heures avant d’en parler à Catherine. Je ne pouvais pas réellement être sûr de ce que j’avais vu… Mais bordel je suis persuadé que c’était bien ce que j’avais vu. Catherine ne me croit pas, elle me dit que ça ne peut pas être vrai.
Alors j’ai douté. J’ai mis plusieurs années avant d’en parler à d’autre gens. Sauf qu’à un moment j’ai pris conscience qu’il était psy pour enfant et que c’était mon devoir de protéger les enfants. Qui sait s’il n’avait pas abusé de quelques-uns. Je ne pouvais pas rester comme ça avec le doute.
Alors j’ai cherché son cabinet dans le bottin : disparu, le cabinet avait fermé. J’ai cherché son nom sur internet : inexistant. J’avais raté le coche et je n’ai pas pu l’empêcher de nuire.
Aujourd’hui encore je le regrette amèrement. Les années ont passé mais je n’ai jamais pu tourner la page. Vous l’aurez compris cette aventure m’a profondément marqué et m’a traumatisé vis-à-vis des psy. Je ne chercherai jamais à convaincre les gens que les psys sont une perte de temps, je crois sincèrement que ça marche si tu y crois et si tu veux te faire aider. Mais pour moi, c’est trop tard, mon rapport aux psy est à jamais détruit à cause de cet évènement. Je sais qu’ils ne sont pas tous comme ça, je sais qu’il y en a des bons mais j’ai un blocage et je pense que je ne pourrai jamais m’y faire.
Tout ce que je peux répondre sur le sujet c’est qu’il y a effectivement beaucoup de psy nuls à chier, mais que ça ne veut pas dire que ça ne vaut pas la peine de chercher. C’est comme un nouveau pantalon, faut prendre le temps d’en essayer plusieurs.
Au-delà de l’histoire de pédopr0n le psy qui plaque des explications toutes faites c’est 100% red flag. Le bon psy il saura mettre des mots, des concepts derrière des comportements ponctuels mais il n’aura pas d’explications sur l’origine de ton mal être avant de longues séances et même là, il est surtout là pour t’accompagner dans une démarche où c’est toi qui te trouve tes propres réponses. Et parfois même il n’aura pas d’explications du tout _ le rôle de psy est d’être dans une démarche de soin et ça passe parfois par des thérapies dites comportementales, qui cherchent à induire des changement de comportement sans forcément chercher le pourquoi du comment.
Bref bon courage si jamais tu reprends les recherches et ne baisse pas les bras.
Je prend en compte ce que tu me dis mais franchement je pense que j’aurais pas le courage d’aller me re-pointer chez un psy après cet épisode là.
Je laisse un message juste pour dire que j’ai bien lu. Mais l’histoire est tellement spéciale que je sais pas quoi en dire.
Peut-être juste dire que t’as pas eu de chance. Je connais une personne qui est contente d’avoir vu un psy, et une autre pour qui cela n’a rien apporté. J’imagine que c’est très random d’en trouver un bon, qui plus est un avec on s’entende bien
C’est très personnel les psy. Comme je disais, je comprend que ça fasse du bien à certains mais 1) faut trouver un bon psy et 2) faut être dans le bon mood et pour moi c’est rappé. Merci d’avoir pris le temps de lire.
ok mais ça t’a coûté combien cette séance
Je sais même plus… peut-être 40€ je crois un truc comme ça.
Question subsidiaire, qui ne change rien a ce que tu as vécu, quel type de métier « psy » as-tu consulté ?
Parce que bon y’a Psychologue, Psychothérapeute, Psychanalyste, Psychiatre…
Ce sont des métiers totalement différents et aussi des façons de faire différentes.
Juste pour dire que parmis les différents corps de métier Psy il n’y a pas que ceux qui t’écoutent (ou pas ?) en silence et en notant.
Bref, je suis curieux si tu te souviens.
De mémoire c’était un psychologue mais comme ma mémoire commence à me jouer des tours, j’ai un petit doute. Disons sûr à 90%