Depuis que je m’intéresse de plus en plus en milieu BDSM je ne me suis toujours demandé en regardant les gens autour de moi si ceux que je côtoie au quotidien sont adeptes des pratiques BDSM. Comme je n’aime pas ne pas voir de réponse, j’ai un peu creusé cette question :
C’est quoi le pourcentage de gens qui pratiquent le BDSM ?
En 2019 j’avais trouvé une enquête réalisée en Australie en 2008 sur échantillon aléatoire sur la question et semblait à l’époque être la base pour beaucoup d’article de l’époque. Elle a été relatée par slate. Près de 20.000 personnes (âgées de 16 ans à 59 ans) ont été interviewées par téléphone de 2001 à 2003. A la question « avez-vous pratiqué le BD ou le SM » (ce qui signifie bondage et discipline, sadomasochisme, ou domination et soumission) 1,8% des hommes et 1,2% des femmes interrogés ont répondu par l’affirmative. En ne retenant que les personnes sexuellement actives on se rapproche de 2% des hommes et 1,4% des femmes.
Alors vu comme ça, 2% ça parait assez peu. Surtout lorsqu’on voit le nombre de personnes actives sur fetlife par exemple. Maintenant, mettons cela en perspective en prenant un exemple relativement simple. Je travaille dans une entreprise de 400 personnes. Statistiquement cela veut donc dire que 8 personnes pratique activement le BDSM. Si je me retire moi-même, cela veut quand même dire que statistiquement il reste 7 autres personnes.
A l’époque où j’avais fait ce calcul, j’étais devenu un peu obsédé par cette statistique et je ne regardais plus mes collègues de la même façon : je ne pouvais pas m’empêcher de penser que telle ou telle personne faisait peut-être partie des 7 ! et cela m’amusait beaucoup.
Seulement 2% ? Vous en êtes sûrs ?
Puis récemment, je me suis re-penché sur ces données pour écrire ce billet de blog et j’ai été surpris de ce que j’ai pu y trouver. Cette étude Australienne a souvent été utilisée comme source fiable mais après l’avoir investigué un peu plus, je pense qu’elle ne vaut certainement pas grand-chose compte tenu de l’échantillon assez faible et surtout des biais qu’il peut y avoir eu lors de l’enquête et surtout des questions posées.
Alors j’ai repris mon bâton de pèlerin et je suis reparti à la pêche aux infos. Et miracle, j’ai trouvé une mine d’or. Je suis tombé sur le site de Univers-BDSM et ils ont bien bossé le sujet ! Ils sont partis comme moi avec cette question en tête « combien de gens pratique le BDSM » sauf que eux, ils ont vraiment creusé la question.
Leurs conclusions sont les suivantes :
Primo, l’étude Australienne est bonne à jeter à la poubelle car elle a été mal faite vue comment les questions ont été mal posées. Ce qui signifie qu’on doit être clairement en dessous de la réalité.
Deuzio, ils ont décidé de retrouver des études fiables et des papiers sérieux sur le sujet. Et croyez moi ils ont bien bossé, ils ont compilé toute une page avec les enquêtes et les papiers scientifiques sur le sujet avec à chaque fois une critique de ce que l’on peut en retirer et des limites de chaque étude.
Globalement, et surtout depuis la diffusion aux non initiés des concepts de « BDSM » (merci Fifty Shade of Gray par exemple), le sujet est moins tabou et les résultats sont sûrement un peu plus fiable. Si vous avez la flemme de cliquer sur leur lien, je vais honteusement reprendre leurs conclusions de l’étude réalisée sur la population belge en 2017 à savoir « Fifty Shades of Belgian Gray: The Prevalence of BDSM-Related Fantasies and Activities in the General Population » paru dans le Journal of Sexual Medicine.
Concernant les fantasmes et pratiques :
- 22% ont ou ont eu des fantasmes BDSM
- 46,8% ont pratiqué au moins une fois une activité de type BDSM
- 12,5% (comptés dans les 46,8%) pratiquent régulièrement une (ou des) activités de type BDSM
- Donc, près de 69% (22 + 46,8) des personnes interrogées ont -au moins- un peu d’intérêt pour le BDSM !
Interrogés/interrogées pour savoir s’ils et elles se voyaient comme étant intéressés/intéressées par le BDSM :
- 26% répondent oui
- 7,6% se déclarent pratiquants ou pratiquantes (85,5% pratiquent chez eux)
- parmi les gens ayant un intérêt : moins de 5% en ont parlé dans leur famille, 24,6% en ont parlé avec un ami ou une amie
Le % d’intérêt dans les rôles de type Domination ou Soumission est équivalent, avec un grand nombre de gens se disant intéressés / intéressées par les 2.
L’intérêt pour le fétichisme est beaucoup plus répandu chez les hommes.
Les participants et participantes du groupe le plus âgé (48 à 65 ans) ont des scores très inférieurs aux autres groupes.
Parmi les gens ayant un intérêt pour le BDSM, 61,4% en ont pris conscience avant leurs 25 ans, et 8% avant leurs 15 ans.
Moralité ces chiffres sont intéressant mais dans la majeure partie du temps le vrai souci vient du fait que les gens ne comprennent pas le termes BDSM. En effet, beaucoup de gens ne captent pas que la fessée pendant la levrette le samedi soir, c’est potentiellement du BDSM. Attacher les mains de sa copine avec un foulard pour s’amuser pendant qu’on la chatouille, c’est aussi du BDSM. Bien souvent, lorsqu’on parle de BDSM, les gens s’imagine immédiatement des cravaches ou les gants à clous, des combinaison en latex avec des masques, des piqûres, des jeux uro, etc. Sauf que ces pratiques extrêmes ne concernent qu’une partie infime des pratiquants du BDSM. Résultat, la fessée du samedi soir est autant du BDSM que 300 coup de fouets !
Mais alors ça fait combien de personnes tout ça ?
Et bien ça fait beaucoup au final.
Les pratiques softs seraient très répandues et si on en crois les études fiables car une personne sur deux aurait déjà essayée et entre 10 à 15% des personnes le pratiqueraient de manière régulière.
Et là c’est plus du tout la même histoire ! Car si on prend la population sexuellement active de 19 à 55 ans (de manière arbitraire hein, on va pas chipoter… je sais que des mineurs et les seniors aussi), d’après l’INSEE, cela représente en 2021 : 28 802 457 personnes. Si on y applique nos conclusions cela signifie qu’on a en France, entre 2,8 et 4,3 millions de personnes qui pratiqueraient régulièrement du BDSM.
Si je reprend mon exemple de départ, cela veut dire que dans mon entreprise de 400 personnes, il y a entre 40 et 60 personnes qui ont des pratiques BDSM et c’est pas rien au final !
Si vous voulez avoir une ressource résumant tout cela, je vous renvoie au livret « le BDSM est très répandu » disponible sur le site de l’unviers-BDSM et que je trouve très bien fait.